En 1967, comme tout le monde, le
Velvet Underground décide de marquer l’histoire de la musique pop en injectant
dans les veines des rares aficionados de l’époque un poison violent, une
héroïne à retardement qui, quarante ans plus tard, a contaminé le monde de la
musique pour s’imposer, seigneur décadent, comme le monument de la perversion
urbaine, le témoignage de l’ombre glauque qui règne sur les rues sombres de
Gotham.
Au tiers du disque, à peine
digéré Femme Fatale clamé par Nico le glaçon, ce bon vieux Lou décide de poser
son parlé-chanté inimitable sur un tapis de désaccords et de larsens à l’alto
exécutés par John Cale l’extrémiste. Le thème subversif du maître et de l’esclave,
les paroles, jusqu’au titre Venus In Furs, sont directement inspirés du roman
de Leopold Von Sacher-Masoch : La Vénus à la fourrure. Cet ouvrage a
défini le masochisme, le terme est dérivé du nom de l’auteur, et le style comme
l’histoire rappellent les variations du romantisme noir que Huysmans ou Baudelaire
porteront aux nues. Il y est question d’un jeune homme envoûté par une amante
dominatrice, d’une statue interdite qui luit dans les bois, la nuit.
La Vénus à la fourrure est aux
Cinquante nuances de Grey ce que Charles Manson est à Bécassine.
« Il faut qu’elle se montre
cruelle envers moi pour que je puisse l’adorer »
« Lentement, avec une
majesté indolente, elle gravit les marches de marbre, abandonne sa précieuse
pelisse et pénètre d’un pas nonchalant dans la salle envahie par la fumée
argentée d’une centaine de bougies. »
Vers la fin du roman, l’essentiel
observateur, voyeur et rival se personnifie : c’est le Grec, qui emportera les
faveurs de la Vénus pour qui le narrateur est devenu esclave :
« ‘Lorsque le lion qu’elle a
choisi pour compagnon se trouve attaqué par un autre lion, raconte le Grec, la
lionne se couche tranquillement et contemple le combat. Si son mâle succombe,
elle ne l’aide pas ; elle le regarde avec indifférence mourir dans son
sang sous les griffes de son rival, et elle suit le vainqueur, le plus fort. C’est
dans la nature des femmes.’
Ma lionne me lança alors un coup
d’œil bizarre. Je frissonnai sans savoir pourquoi, et la lumière rouge de l’aurore
nous plongea tous les trois dans le sang. »
Voici ce que Lou Reed en a tiré :
“Downy sins of streetlight fancies
Chase the costumes she shall wear
Ermine furs adorn the imperious”
Chase the costumes she shall wear
Ermine furs adorn the imperious”
“Severin, severin awaits you thereI am tired, I am weary
I could sleep for a thousand years
A thousand dreams that would awake me
Different colors made of tears”
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