Détail d'une fenêtre d'usine. |
dimanche 29 décembre 2013
Dublin Postcard
Carte postale de Dublin, les cuves de bière, les cheminées d'usine, le front de mer.
mardi 24 décembre 2013
Paris 1919 - Le coton après l'aiguille
Un album dans le coton. Après
avoir lacéré de son alto distordu toutes les nuances de glauque avec le Velvet
Underground, après avoir révolutionné la musique pop en deux disques (il claqua
la porte de la Factory en cours d’aventure), le Gallois John Cale, violoniste
de formation classique, s’aventura dans des contrées douces, scintillantes, en
gros, magiques. Il y a Vintage Violence, sublime mais peut-être
un peu inégal, et il y a surtout ce Paris 1919, avec sur la
pochette, Cale en bourgeois français de la Belle Epoque, costume blanc trois
pièces. Costume Prince de Galles, oserait-on.
Il y avait du blanc dans le
Velvet, par « White Light / White Heat » of course, par le sentiment
de flash de chaleur éblouissant qui parcourait toutes les chansons saturées et
tortueuses comme, on l’imagine, des
montées de shoots d’héroïne. Mais dans « Paris 1919 », le blanc est ouaté,
neigeux, parce que les sons cristallins et les cuivres chauds soutiennent la
voix extraordinaire de Cale quand il fait s’envoler ses paroles étranges,
rassurantes et décadentes à la fois.
Paris 1919 est un
cocon qui enveloppe dès les premières notes de « Child’s Christmas In
Wales » (déjà, rien que le titre…Il faut être sacrément sûr de son talent
pour oser un titre aussi risqué, Dickens n’est pas loin) ; la chanson
démarre en fanfare et doucement à la fois, cheval bridé, un démarrage hanté que
l’on retrouvera, bien plus tard, dans l’ouverture de « Funeral » d’Arcade
Fire, avec le vampirou « Neighborood #1 (Tunnels) ». Les deux rocks
qui invitent McBeth et Graham Greene, au milieu du disque, sont produits de la
même manière, donnant l’impression magique d’unité du début à la fin :
rien de tranchant, les angles sont arrondis comme dans un salon Art Nouveau,
boisé, doux, organique. On peut d’ailleurs légitimement penser que les
meilleurs albums de pop sont ceux qui, sans offrir d’Everest évident, morceaux
de bravoure, solos de guitare du siècle, privilégient modestement une
homogénéité, chaque chanson pourrait être la suivante sans lui être pour autant
exactement identique. Ils témoignent d’une cohérence totale dans l’inspiration,
l’exécution et la production. Odessey And Oracle des Zombies, Axis :
Bold As Love de l’Experience de Hendrix… After The Gold Rush
de tonton Neil… Forever Changes de Love…Plutôt des albums-grotte
que des disques-cathédrales.
Lorsqu’on a presque fini de
fouiller la neige de Paris 1919, et que se termine l’envoûtant « Half
Past France » et son soldat désabusé retournant au pays et regardant un
pays en ruine derrière une fenêtre de train couchette pleine de buée…La dernière
piste s’ouvre, et à force de gratter, on a trouvé la glace : « Antarctica
Starts Here », susurrée, conte l’histoire d’une étoile gelée,
inaccessible, cruelle, et semble avoir
été écrite pour Nico. C’est une chanson d’amour impossible, désabusée et
déchirée, mais adoucie à la morphine. Ici encore il y a un voile entre la
douleur et l’oreille de l’auditeur qui n’est quand même pas dupe.
Ce point final de l’album trouve,
ô hasard, un reflet exact dans un autre disque paru la même année, 1973 ;
pas n’importe lequel. C’est le chef d’œuvre
du jumeau maléfique Lou Reed, et c’est là aussi un album plein du bizarre européen de l’entre-deux guerres : Berlin. La chanson
concernée se nomme « Caroline Says II », le thème est le même, l’ombre
de la Chelsea Girl plane également, et pour compléter le miroir de glace
(saisissant puisque toute ressemblance est fortuite, même si "Caroline Says"
était en gestation depuis quelques années sous un autre titre), là où John Cale
déclare que l’Antarctique commence ici, Lou Reed explique que tous les amis de
cette impossible Caroline l’ont surnommée…Alaska. L’un est au Pôle Nord et l’autre
au Pôle Sud, mais même à cette distance la compétition pour la perfection continue.
“Antarctica Starts Here”
The paranoid great movie queen
Sits idly fully armed
The powder and mascara there
A warning light for charm
We see her every movie night
The strong against the weak
The lines come out and struggle with
The empty voice that speaks
Her heart is oh so tired now
Of kindnesses gone by
Like broken glasses in a drain
Gone down but not well spent
The road from barbary to here
She sold then stole right back
The vanity, insanity her hungry heart forgave
The fading bride's dull beauty grows
Just begging to be seen
Beneath the magic lights that reach from
Barbary to here
Her schoolhouse mind has windows now
Where handsome creatures come to watch
The anaesthetic wearing off
Antarctica starts here
Inscription à :
Articles (Atom)